Krazy Kat 1917-1922

série: Divers us albums
dessinateur / scénariste: Herriman George
éditeur: Futuropolis EO 1981
genre: Humour Noir
classement: biblio704
date: 1981
format: cartonné, avec jaquette
état: TBE
valeur: 40 €
critère: *
remarques: volume 1 en N&B édité par Futuropolis en 1981,
il existe deux autres volumes
édités par Futuropolis dans la collection Copyright:
- volume 2 1921-1931, mise en couleurs
bichromie, édition 1985
- volume 3 1935-1936, mise en couleurs
quadrichromie, édition 1990
seul le volume 1 est collectionné ici
à titre d'exemplaire représentatif de la série

George Herriman 1880-1944,
ou le triangle infernal de la quadrature
du cercle en racine carrée

première planche sans titre parue en 1901
dans le Phidadelphia Sunday Press,
puis en 1906 Grandma's girl et major
Ozone's fresh air crusade,
1914 ce sera the Dingbat family avec le
détective Trails Dingbat,
enfin en 1919 apparition de Krazy Kat,
bande à contenu social qui s'intègre très vite
dans les tranches de vie
du supplément dominical en couleur,
la scène est dressée, la trame établie,
le drame peut se jouer

l'extraordinaire triangle qu'allait former
Krazy Kat, symbole d'une société masochiste
et béate, pleine d'une sentimentalité stupide,
l'officier de police Offissa Pupp, caricature
d'un ordre inefficace et complice,
et l'ignoble Ignatz Mouse, fondamentalement perverse,
qui invente le skate-board par paresse,
ne pense qu'à égrener quelques insanités surréalistes
à peine compréhensibles pour cause d'accent et
lance la brique à Krazy Kat comme d'autres embrassent

à noter que Ignatz est souvent interpellé au masculin
alors que Krazy Kat l'est au féminin (ma chère Krazy)

en 1971, Bobby London reprit l'univers de Krazy Kat
en le réactualisant sous le titre "dirty duck"

1/ Baron Bean 1917
= aventures nautiques en noir%blanc

2/ Krazy Kat
bances quotidiennes de 1937 à 1938


3/ planches du dimanche 1922-1943
(gags en une planche)
Ignutz le lanceur de brique, le tapis magique,
la prison (jail) de Offissa Pupp,
le bled de Coconino, ma chère Krazy,
Krazy Kat fait de l'astronomie,
la première des dernières femmes,
la peur du gendarme,
happy birthday mr. Mouse, le monogramme,
et diverses autres gags d'une planche


>> les aventures loufoques mais soi-disantes
intellectuelles de Krazy Kat, Ignatz Mouse et
du sergent Offissa Pupp, mais pour savourer
tous ces gags, il faut vraiment aimer le genre

n.b. certaines mauvaises langues disent parfois
que Krazy Kat ne devait sa longue existence
qu'à l'admiration sans borne
que lui portait William Randolph Hears,
propriétaire du King Feature Syndicate

annexes
- couverture, 4ème plat et extraits de l'album
- couverture des deux autres albums
publiés par Futuropolis
(non collectionnés ici)



Information
Krazy Kat est un comic strip américain créé
par George Herriman (1880-1944) et publié dans
les journaux du pays, en semaine et le week-end,
entre 1913 et 1944,
sa première publication eut lieu dans le
New York Evening Journal de William Randolph Hearst,
la série mêle nonsense, poésie et insouciance enjouée,
ce qui en a fait l'une des bandes dessinées préférées
des passionnés et des critiques depuis plus de 90 ans

les strips sont centrés sur une relation triangulaire
entre son personnage éponyme,
un chat innocent et désinvolte de sexe indéterminé
(plutôt féminin), son antagoniste Ignatz Mouse
(plutôt masculin) et le sergent Pupp (Offissa Pupp),
officier de police,
Krazy est transi d'amour pour Ignatz, mais celui-ci
le méprise et passe son temps à chercher à lui
lancer une brique à la tête, ce que Krazy interprète
comme une preuve d'amour,
Pupp, en tant que garant de l'ordre de la
région de Coconino, fait tout pour empêcher Ignatz
d'arriver à son but et enferme bien souvent
la souris en prison

en dépit de la simplicité de l'intrigue,
la peinture détaillée des personnages,
la complexité de l'œuvre, à laquelle s'ajoute
la grande créativité verbale et visuelle d'Herriman,
font de Krazy Kat l'une des premières bandes
dessinées à avoir été considérée comme de l'art
par les intellectuels (ou comme du lard?)

Gilbert Seldes, célèbre critique d'art de l'époque,
écrivit en 1924 un long panégyrique de la bande,
la qualifiant de "travail artistique le plus amusant,
fantastique et satisfaisant de l'Amérique contemporaine",

le poète renommé E.E. Cummings, autre admirateur
de George Herriman, écrivit l'introduction
du premier album de Krazy Kat,
plus récemment, beaucoup de scénaristes et dessinateurs
constatent que le strip a eu une influence majeure
sur leurs œuvres

malgré cette fortune critique, Krazy Kat est
longtemps resté mal édité, ce n'est qu'à la fin
des années 2000 que, grâce au travail de Fantagraphics,
l'intégralité des pages du dimanche est devenue
disponible, les daily strips sont en 2011 toujours
non réédités pour la plupart

dans le monde francophone, Futuropolis a publié
quelques volumes dans les années 1980,
faisant fi des grandes difficultés de traduction
de l'œuvre, les droits de l'édition Fantagraphics
ont été achetés en 2009 par les Rêveurs qui sortent
un premier volume (1925-1929) en octobre 2012

les personnages principaux:
- Krazy Kat, un peu simple d'esprit et très curieux,
le personnage éponyme de la série vit sa vie
nonchalamment dans le comté de Coconino,
il parle dans un argot hautement stylisé
("a fowl konspirissy, is it pussible?")
évoquant l'anglais, le français, l'espagnol,
le yiddish et d'autres langues,
exprimant son inaltérable bonne humeur
en chanson et en danse, Krazy est éperdument
amoureux d'Ignatz, et pense que les briques
par lesquelles celui-ci répond à cet amour
expriment une réciprocité sentimentale,
Krazy n'a aucunement conscience de la féroce
rivalité entre Ignatz et le sergent Pupp
et croit que les fréquentes arrestations
de la souris par le chien policier ne sont
qu'un innocent jeu de gendarme et voleurs
(chak foie ke je les vois s'amouzer enzemble,
c'est Ignatz ky perd),
lorsqu'Ignatz est arrêté avant d'avoir pu
lancer sa brique, Krazy cherche désespérément
son "zéri" et se demande où il a bien pu passer,
le sexe de Krazy n'est jamais clairement défini,
Herriman préfère laisser planer l'ambiguïté,
et joue même dessus dans plusieurs strips,
lorsque le cinéaste Frank Capra, aficionado du strip,
demanda à Herriman une réponse précise, l'auteur
répondit que Krazy était "quelque chose
comme un elfe ou un esprit, ceux-ci n'ont pas de sexe,
donc ce Kat ne peut être mâle ni femelle,
Krazy est un esprit, un lutin, libre de
s'immiscer dans ce qu'il désire"
en effet, cette indétermination est essentielle
dans un strip où tout est mouvant et incertain,
plusieurs critiques, à commencer par Cummings,
ont néanmoins fait de Krazy Kat une chatte,
erreur qui se retrouve encore fréquemment
dans les ouvrages de vulgarisation comme
dans certains articles scientifiques

- Ignatz Mouse s'amuse de la naïveté de Krazy,
et rien ne le réjouit plus que de jeter une brique
sur la tête du chat, pour éviter que ses plans
ne soient déjoués par le sergent Pupp,
toujours vigilant (et toujours suspicieux),
Ignatz cache sa brique, se déguise, ou engage
d'autres facétieux habitants du comté
(sans jamais expliciter ses intentions),
l'empressement que met Krazy à le rencontrer
n'importe où et n'importe quand afin de
recevoir la brique qu'il croit marque
d'affection facilite grandement la tâche
de la souris

- le sergent Pupp (Offissa Pupp) est le bras
de la loi et de l'ordre, le sergent Bull Pupp
(aussi appelé flikard ou serzent pour traduire Offissa)
essaie en permanence, en y arrivant parfois,
de faire obstacle aux desseins d'Ignatz,
le sergent Pupp et Ignatz se donnent toujours
au maximum dans leurs confrontations,
même lorsque Krazy n'est pas directement impliqué,
car ils adorent voir l'autre passer pour un idiot,
l'espèce du sergent n'est pas très précise,
on parle parfois d'un bouledogue


Krazy Kat se développa à partir d'un autre comic strip
d'Herriman, the Dingbat Family, qui avait débuté en 1910,
l'auteur remplissait le bas des pages de cette
série avec des gags slapstick
(n.b. slapstick est un genre d'humour impliquant
une part de violence physique volontairement exagérée)
sur les aventures d'un chat et d'une souris,
ce strip de bas de page finit par devenir plus important
que la bande dessinée sous laquelle il était né,
Krazy Kat devint un comic strip quotidien possédant
son propre titre (qui était présenté verticalement
sur le côté de la page) le 28.10.1913
puis eut également droit à sa page du dimanche,
en noir et blanc, à partir du 23 avril 1916,

à la suite des protestations des éditeurs qui
ne trouvaient pas que la série convenait
à la rubrique "bandes dessinées",
Krazy Kat apparaissait, dans les journaux de Hearst,
sous celle d'art et théâtre, cependant, Hearst
aimait tant la série qu'il fit signer à Herriman
un contrat à vie tout en lui garantissant une totale
liberté de création

malgré son faible succès auprès du grand public,
Krazy Kat était très suivi par les intellectuels,
en 1922, un ballet jazz inspiré de la série fut produit
et mis en musique par John Alden Carpenter,
avec une chorégraphie d'Adolphe Bolm et des
décors et costumes de Herriman,
bien que le spectacle fût joué à guichets fermés,
il ne permit pas à la bande dessinée de gagner
en popularité, contrairement à ce que Hearst
avait espéré,
en plus de Seldes et Cummings, on trouvait
parmi les contemporains admirateurs de Krazy:
Kat Willem de Kooning, H. L. Mencken, et
Jack Kerouac
des chercheurs plus récents ont vu dans
cette bande dessinée un précurseur de dada
ou du postmodernisme

la publication en album couleur des planches
du dimanche débuta en 1935,
bien que le nombre de journaux à publier
Krazy Kat décrût après cette date,
Herriman continua à animer ses personnages
(créant ainsi près de 3000 planches),
jusqu'à sa mort en 1944, Hearst refusa
qu'un autre auteur prenne la suite de la série,
contrairement aux usages du temps, car il la savait
intimement liée à son créateur

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